Ces dernières décennies, les développements technologiques ont élevé le niveau de la neurologie. L’exemple le plus frappant est sans doute l’apport de l’IRM, qui donne une vision sans précédent du cerveau. De nouvelles techniques issues du monde de l’intelligence artificielle font une entrée rapide dans notre vie quotidienne. Pensez par exemple à la détection des piétons qu’offrent les voitures les plus récentes. À cet égard, l’apprentissage automatique est utilisé pour faire la distinction («catégorisation») entre la «forme» des piétons devant la voiture et d’autres objets, par exemple dans un car-wash.
L’apprentissage automatique est une technique robuste et sensible qui peut être utilisée dans de nombreux domaines. Parfois, les médias annoncent que ces techniques vont bientôt supplanter les médecins, car elles leur seraient supérieures pour poser des diagnostics. En effet, les ordinateurs ont accès à une énorme quantité de littérature spécialisée (Pubmed, p. ex.) qu’ils pourraient parcourir en un clin d’œil afin de faire correspondre les symptômes du patient, qui forment un «schéma», avec le diagnostic correct. À première vue, cela semble un moyen rapide et performant de poser un diagnostic.
Toutefois, une certaine connaissance de l’apprentissage automatique est nécessaire pour se rendre compte qu’il faut être attentif à quelques mises en garde. Comme l’indique le terme, cette méthode sert tout d’abord à «apprendre» à reconnaître des schémas sur la base de grands ensembles de données. Ceci suppose que, dans ces ensembles de données, tous les diagnostics ont été posés correctement par un médecin, et non par une machine. Pour certaines affections, cela semble vraisemblable (p. ex. la détection d’un saignement sur un CT-scan), mais pour d’autres maladies, on ne dispose pas de grandes bases de données fiables (p. ex. des maladies rares qui nécessitent une confirmation neuropathologique).
Deuxièmement, il me semble très inconsidéré d’introduire l’apprentissage automatique en pratique, sans savoir comment une telle méthode arrive à un diagnostic. Les articles évoquant ces techniques rapportent parfois un résultat significatif, sans dire quels éléments ont été décisifs pour la classification (en fonction de la technique, ceci est ou non facile à retracer). Ainsi, il va de soi qu’on ne peut parler de véritable prestation si la technique prédit que les personnes âgées souffrent plus souvent de la maladie d’Alzheimer, par exemple. Il faut malgré tout reconnaître que l’apprentissage automatique peut repérer des schémas parmi des dizaines de variables, ce que nous, médecins, ne sommes souvent pas capables de faire. Sur ce plan, ces techniques ont véritablement encore des choses à nous apprendre.
Remplacer les médecins par des algorithmes: pour le moment, ce n’est donc pas du tout à l’ordre du jour. Par contre, l’apprentissage automatique peut nous offrir une aide commode. Un bel exemple est celui d’une étude de 2018 lors de laquelle les CT scan ont été classés au moyen de l’apprentissage automatique comme suspects ou non suspects d’hémorragie intracrânienne (ICB). Les clichés suspects d’ICB ont été placés «en haut de la pile» du radiologue, ce qui a permis de détecter plus rapidement les ICB. Il y a donc peut-être une place pour l’apprentissage automatique en tant qu’outil numérique.
Les prochaines années, ceci deviendra assurément un sujet passionnant dans notre paysage médical en constante mutation.